«Vous lui avez sauvé la vie»
911. Un soir de juillet comme les autres: il fait beau, il fait chaud. Fidèles à leur habitude, les membres du Club de course de Charlesbourg (Club 3C) se donnent rendez-vous dans un parc des environs. Ça jase, ça rit, ça s’échauffe légèrement. En une fraction de seconde, tout bascule: l’un d’eux s’effondre, le corps terrassé de convulsions, la respiration difficile, de plus en plus espacée… Et bientôt la poitrine cesse de se soulever.
Ce qui pouvait ressembler a priori à une crise d’épilepsie se transforme en arrêt cardiorespiratoire (ACR). Quelques minutes au plus se sont écoulées, pendant lesquelles une membre du club a composé le 911.
Il n’y a pas de temps à perdre. Dans le groupe,
ils sont quelques-uns à avoir leur formation de réanimation cardiorespiratoire (RCR). Deux coureurs se partagent le massage cardiaque. Trente compressions, suivies de deux bouffées d’air envoyées dans les poumons par bouche-à-bouche. Mireille, la responsable du Club 3C, s’en charge. Elle tient le visage inconscient de son ami et s’occupe de lui donner l’air essentiel pour garder son cerveau vivant. Elle l’a fait tant de fois auparavant… sur un mannequin. Cette fois, c’est vrai, une vie est en jeu.
Le temps paraît long quand les chances de survie se mesurent aux secondes qui passent. Mireille lui répète de rester avec eux. Eux qui, ce soir-là, sont tous là pour aider à sauver sa vie à la mesure de leurs capacités.
Les sirènes. Enfin, l’ambulance. Après une dizaine de minutes interminables, le temps s’accélère. On s’empresse de préparer l’appareil de défibrillation (DEA). Continuez votre intervention, leur disent les ambulanciers dans l’intervalle. Soulagement furtif chez ceux qui prodiguent la RCR: ils ont bien agi selon les règles de l’art. Ils remettent maintenant la vie de leur ami entre les mains des ambulanciers.
«Il court des marathons», répète Mireille, incrédule, aux policiers qui l’interrogent sur les antécédents de santé de l’homme dans la cinquantaine. Escortée de trois véhicules de la police, l’ambulance quitte les lieux en toute urgence vers l’Institut de cardiologie, à l’hôpital Laval.
«Il parlait de son entraînement pour le marathon des Deux-Rives et, tout à coup, il est tombé à terre. Juste à voir son visage, je savais que c’était grave.»– Mireille Massé
La vie devant soi
Pierre* sera mort trois fois avant de reprendre conscience, deux jours et cinq pontages plus tard, dans son lit d’hôpital. Ses artères, manifestement obstruées, étaient passées sous le radar de ses bilans de santé annuels. Une longue convalescence l’attend, mais sans séquelle aucune.
Les ambulanciers l’ont confirmé aux coureurs: «Vous lui avez sauvé la vie.» Mireille Massé sourit au souvenir de cette toute petite phrase qui a donné une fin heureuse au mauvais rêve. Quelques semaines après ce fameux soir de juillet, elle fait le récit de ces événements qui donnent la chair de poule. «C’était irréel. Tu es dans un parc avec un ami, et tu te retrouves à faire la RCR, entourée d’ambulanciers et de policiers…»
* Prénom fictif; l’homme a préféré taire son identité.